Géométrie et comportement VTT / fat : 4 - les géos de mes vélos
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Allez comme je suis pas chien et que je n’ai rien à perdre et tout à gagner, je vous parle de mes choix perso et notamment de mes chouchous : Lara et Double 4 qui sont respectivement une arme de guerre pour terrains descendants très techniques et un giga jouet polyvalent
Le crédo de Salamandre c’est le fat ludique pour s’amuser. Pourquoi je n’aime pas les fats du commerce ? Je le dis tout net et sans détour parce que je trouve que ce sont des tanks à 99%. On commence à voir arriver des vélos un peu moins timides comme le Surly Wednesday mais on est encore très loin du fat ludique comme je l’aime. Pour moi les fats sont dérivés des snowbikes des origines. Ils sont longs et bas, très bien pour enquiller les bornes (éventuellement vite, ce n’est pas en cela que je les trouve tanks) ou pour poser le pied dans la profonde mais pour jouer, si vous mesurez moins de 1.85, vous aurez du mal à vous déplacer suffisamment sur ces vélos pour en faire ce que vous voulez et vous allez vite y laisser beaucoup d’énergie.
Avec ces deux vélos, deux façons de s’amuser. Avec Lara, c’est en repoussant ses limites, en allant taquiner les terrains qui nous font peur et en les maitrisant. Avec Double 4 c’est en exploitant tout ce qu’on trouve sur le terrain où on roule pour en faire un parc d’attractions. Double 4 est polyvalent, Lara ne l’est pas.
Double 4 :
Double 4 c’est la Salamandre n°44, un numéro que je m’étais réservé (c’est un nombre numérologiquement très puissant que je porte en moi) pour un vélo avec lequel j’atteindrais une certaine puissance, un certain aboutissement. Et ce vélo ne m’a pas déçu et il devrait encore moins me décevoir dans sa version revisitée à venir dans 10 jours environ.
Double 4 (bleu) a succédé à Hulk (vert évidemment). Beaucoup moins vert mais beaucoup plus vif
Double également pour la transmission dinglespeed. Le dinglespeed pour moi ce n’est pas un vélo à deux vitesses (dualspeed) mais un double singlespeed. C’est à dire que quand on choisit une vitesse on a choisit pour un moment, on ne zappe pas. J’adore le singlespeed. C’est probablement ma forme de roulage préféré. C’est vif, léger, compact, fiable et surtout extrêmement simple (j’adore la simplicité). Mais quand on s’attaque à la montagne c’est vite sévère. Le dinglespeed, c’est un singlespeed avec une seconde vitesse “remonte pente”. Le principe est simple : deux plateaux et deux pignons, pas de croisement de chaine, on utilise toujours l’un en face de l’autre, somme des dents de la ligne de droite = somme des dents de la ligne de gauche comme ça à un pouilème près la longueur de chaine réclamée est identique donc pas besoin de la retendre. En pratique, quand je veux changer de vitesse, je desserre juste le blocage rapide sans enlever la roue (ça met un peu de mou) et je passe la chaine à la main. 10 secondes chrono. Forcément c’est pas un changement de vitesse de course mais dans une sortie c’est pas rédhibitoire.
Un avantage du dinglespeed c’est que ça dégage de la place. Avec une transmission à dérailleur (pas de S, maintenant en VTT le monoplateau est devenu la norme) on est contraint par la ligne de chaine. Si on a un moyeu arrière en 170, la ligne de chaine théorique centrale est de 63mm pour un plateau en moyenne de 26-28 dents pour les montagnards (les plaineux montent à 30). En Rohloff on se retrouve à peine mieux loti avec une ligne à 71.5mm pour un 32 dents en général. En dinglespeed j’ai tout envoyé à droite avec l’astuce d’un spider Middleburn pour axe carré monté sur un pédalier RS8 X type. Résultat : un 24 dents sur une ligne de chaine de 72 et un 30 dents sur une ligne de 79. Ça vous dégage le bases ça non ? Le résultat est sans appel puisque les bases de Double 4 sont capables d’accueillir le Surly Lou (le plus gros fat avant l’apparition de l’énorme Vee Snowshoe 2XL réservé à des cadres très spéciaux) dans 417 petits mm au minimum du réglage (et 432 au maxi). De quoi jouer !
Oui de quoi jouer mais moi je voulais encore plus. La moyenne des fats du commerce a un BB drop de 60mm, Double 4 aura 45mm (j’ai fait pire, le citron a 35mm) ! Résultat, Double 4 est un pur jouet avec lequel je m’amuse en permanence. En montée, évidemment il faut le tenir et savoir le placer. Mais sur un WE fat dans le Pilat, je suis le seul à avoir passé sur le vélo les trois montées les plus sévères. Peut être pas grâce à la géométrie (mais elle n’a rien empêché) mais probablement grâce à mon braquet plus gros que la moyenne (22x28) qui m’a permis (obligé aussi) de garder du rythme et de ne pas me faire déséquilibrer par un caillou roulant.
Sur les marches, la séquence suivante montre bien ce que j’indiquais : quasiment pas besoin de tirer, juste se placer en arrière, laisser le vélo descendre en se redressant et amortir. Un pur régal
Et en descente je me régale, le vélo est vif, les pneus pardonnent et la possibilité d’alléger l’avant du vélo permet de descendre plein gaz dans le cassant là où je me fais brasser avec des vélos plus longs (notamment Framboise, mon premier vélo en boite Pinion, prévue pour recevoir n’importe quel pneu arrière mais qui du coup est trop longue et que je n’aime pas du tout).
J’ai même équipé Double 4 de fixations et points d’emports variés pour voyager en Fat-packing car pour moi la simplicité du DS est complètement compatible avec le voyage nature.
Evidemment, je ne propose ce type de géométrie qu’à des clients dont je sais qu’ils auront plaisir à l’exploiter. Si besoin de tempérer un peu le vélo, je commence par agir sur le BB drop. Redescendre simplement à 55 pose pas mal le vélo. Ensuite, je peux rallonger un peu les bases. Par rapport à la moyenne des fats du commerce (455/60) il y a vraiment beaucoup de marge en partant de ce (417/45).
Lara :
Commençons tout de suite par une très mauvaise nouvelle : Lara est morte La bonne nouvelle c’est qu’avant de mourir elle a dévoilé ses secrets :D. Lara pour Lara Croft évidemment, une guerrière dotée d’une fabuleuse paire de… L’idée de Lara m’est venue le jour où avec mon pote Pascal (ceux qui ne connaissent pas Pascal pourront se délecter de ses cris de guerre sur sa chaine vidéo) nous avons découvert une fabuleuse descente sur le Tanargue (Ardèche), descente que nous avons également baptisée Lara. Ce jour là Pascal m’a forcé à sortir toutes mes compétences techniques et à m’approcher de mes limites comme je ne le faisais jamais. Et à engager dans la pente avec de gros rochers, m’est venu l’idée d’un vélo fait pour ça. Un vélo qui ne bute pas sur les obstacles qu’on peut jeter dans du très, très pentu, capable de sauter une marche sans vitesse et qui ne s’accroche pas entre les rochers.
En train de descendre Lara (la descente) sur Double 4
Quelques jours après était soudé un cadre répondant à ces impératifs géométriques : avant long, boitier de pédalier bas, bases ultra courtes, axe de pédalier court et moyeu arrière étroit. Lara était née. Trop souple elle a été modifiée puis recoupée puis remodifiée. Je n’ai jamais eu vraiment l’occasion de la tester mais cet été je l’ai prêtée à Pascal qui l’a promenée d’Ardèche aux Alpes Maritimes, lui a fait subir les pires descentes et a fini par la casser (les potes je vous jure !!! ). Mais il est revenu avec la banane “C’est ça qu’il me faut. On se programme le nouveau projet dès que possible”.
Lara pose dans la cascade pendant qu’Antoine sur Framboise passe en haut
C’est ainsi que dans le courant de l’automne sont nées Larabis tout de orange vêtue, monture de guerre de Pascal et La Rédemptrice aux couleurs angéliques (camaieu de bleus) avec laquelle j’entends bien ramener Pascal à la raison en lui montrant qui est LE CHEF !!!
Alors la recette : On part sur du singlespeed de rapport 1. Pourquoi ? Parce que ces vélos ne sont pas faits pour grimper. En général on monte par là où on va descendre et comme c’est déjà ultra sport à la descente, la montée se fait avec le tube diagonal dans le dos, un bras de fourche et la manivelle gauche dans chaque main ! :evil: En descente ça va doucement, il y a souvent quelques légères remontées donc le rapport 1:1 va pas mal. Et surtout, ça dégage une place folle. Nous sommes partis sur du 22x22 et avons atteint 398mm au mini sur Larabis (avec une base droite affinée) et 401mm sur La Rédemptrice (sans rien affiner mais ça passe près).
Ces bases ultra courtes permettent d’augmenter le BB drop tout en conservant une grande capacité d’allégement de l’avant (forcément, on peut s’asseoir derrière la roue arrière !). Donc pour comparer un peu, dans un but expérimental on a mis 60 sur Larabis et 55 sur La Rédemptrice (les vélos sont identiques par ailleurs on est foutus pareil). On verra si on voit la différence.
A l’avant, potence ultra courte (35mm) et angle de 68° permettent d’avancer la roue d’environ 3 cm par rapport à Double 4 par exemple. Coupé au boitier bas, ça donne un gros effet anti OTB.
Mais bon, contrairement à ma doctrine “Si on essaie pas on ne saura pas” (tiens je l’ai pas encore mis en signature), je ne me fie pour l’instant qu’aux dires (enchantés) de Pascal car la Rédemptrice terminée, il ne fait que pleuvoir en Ardèche. Et pour aller taquiner du caillou extrême, autant qu’il soit sec…
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Je pense et j’espère que je ne vais pas être le seul à te remercier pour ces différents sujets, un seul mot me vient: MERCI.
C’est vraiment hyper appréciable de partager cela avec nous, et on apprécie.
J’espère que tous les gens qui liront ces sujets auront la décence d’en faire autant car cela mérite.
Je trouve l’approche très intelligente et moi qui avait pour lointain projet de me faire un fat, je sais maintenant quelles questions je vais me poser, surtout que je me reconnais tout à fait dans les différents profils évoqués.Pour l’instant ce qui me vient à l’esprit c’est de savoir la raison de la casse ? tube tordu ? casse à la soudure ?
TU as un peu enquêté pour connaitre les raisons ?Je pense que j’aurais d’autres questions lorsque je reflechirai à mon projet
C’est un plaisir de te lire en tout cas
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bon, je veux une lara!! hahahah!
mon cher yann, on est fait pour s’entendre!
très grand fan de single speed, de vélo ultra simple, et surtout de vélo pour faire le couillon! ahaha… allez savoir pourquoi j’aime le bmx…
bon ca donne envie de passer en Ardèche tout ça!!! -
Ben faut pas hésiter à passer !!!
Lara a cassé parce qu’elle a été bricolée, découpée, tordue, ressoudée, que certaines soudures ont et refaites 3 fois au même endroit, que pour la porter facilement j’avais un peu trop tiré sur le poids et que Pascal l’a méchamment fait tomber dans les cailloux… Bref un bon proto à martyriser qui a vécu sa vie de proto et dit ce qu’elle avait à dire. Et sur les suivantes on est partis directement sur les bonnes bases.
Ah oui j’oubliais, Double 4 en courbe se place dans un mouchoir, enrouler les épingles est une formalité et il faut déjà qu’elles soient bien resserrées avant d’avoir à jouer du pivot. Chaque fois que j’ai eu l’occasion de suivre des vélos d’enduro je les ai vus se battre pour inscrire leur vélo dans les successions de virage alors que je me baladais comme au circuit lent du permis moto : un coup à gauche, un coup à droite et ça enroule. Les mecs avaient intérêt d’avoir pris de l’avance dans les gros bouts droits plein gaz avant d’entrer dans les sections à virages !
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Tes explications donnent vraiment envie d’essayer un FAT, moi qui pratique le BMX en champs de bosse et la descente en été (JURA), je pense que je kifferai ce type de vélo.
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Balaise tout ça. Il va falloir que je te lise à tête reposée. Mais d’avance, un grand merci pour toutes ces infos.